La population de l’Outaouais a accueilli avec satisfaction et grand soulagement l’annonce de la construction d’un hôpital tout neuf, dans la foulée du renouvellement de plusieurs infrastructures hospitalières désuètes au Québec.
Comme l’indiquait le ministère de la Santé le 14 octobre 2020, le nouvel hôpital affilié universitaire regroupera plusieurs spécialités. Il nécessitera en conséquence une réorganisation importante de l’ensemble de l’offre de services de la région et permettra un ajout net de 240 lits.
La concentration des spécialistes sur un même site favorisera le travail interdisciplinaire, la rétention du personnel, l’optimisation de l’organisation médicale de même qu’un rehaussement du niveau de soins spécialisés pour le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais, qui deviendra le Centre hospitalier affilié universitaire de l’Outaouais.
Bien que cette annonce soit une excellente nouvelle pour les services en santé au sens large, il est essentiel de prendre les bonnes décisions au fur et à mesure de son développement, pour que l’ensemble de l’œuvre soit le succès que la population de l’Outaouais est en droit d’attendre.
Un projet de cette envergure a une influence de plusieurs ordres sur le bien-être d’une population : on ne peut rater cette opportunité unique de marquer l’identité de notre région. La santé et les services sociaux constituent un des éléments les plus résonnants du quotidien de tout citoyen, peu importe son âge, son état de santé et son statut économique. Les impacts potentiels au plan du développement régional pour plusieurs dizaines d’années imposent une rigueur absolue des décideurs, qui doivent tenir compte de toutes les dimensions reliées à son évolution.
Les infrastructures qui soutiennent les activités du réseau doivent être éloquentes pour toutes ses composantes directes : la promotion de la santé, la prévention, l’accès aux services qu’ils soient courants et de première ligne, ou spécialisés et ultraspécialisés. Ses impacts au plan du développement économique et développement durable sont extraordinaires. La fierté que peuvent ressentir les citoyens envers leur réseau de santé est déterminante et parmi les facteurs les plus probants qui définissent le privilège d’habiter dans une région spécifique.
L’Outaouais est à la croisée des chemins dans la poursuite de ce projet d’envergure. Un moment crucial approche, le choix du site où sera érigée l’installation. L’infrastructure elle-même peut être construite de différentes façons et être adaptée aux besoins de l’environnement, avec l’ensemble des expertises disponibles sur la planète. Ce qui par contre, ne peut faire l’objet de compromis avec un minimum de risques, c’est sa localisation, surtout considérant que l’ensemble de la population de l’Outaouais sera desservi principalement par ce nouvel hôpital. Peu importe le niveau de services de première ligne ou spécialisés qu’offrira le nouvel hôpital, le choix de l’endroit où il sera construit ne peut être bâclé. Celui-ci doit s’appuyer sur des éléments tangibles et significatifs pour l’ensemble de la population, respectueux de ce qu’il y a de plus fondamental : pas besoin d’être malade pour être fier de sa région.
Un établissement hospitalier est beaucoup plus qu’un endroit où on se fait soigner. C’est un symbole imposant aux multiples dimensions. Il faut le voir de partout, l’accès doit être facile et rapide, possible par tous les moyens de transport collectifs ou individuels modernes, représentatifs de l’ensemble de sa population. Il doit absolument être près du milieu communautaire, le plus loin possible de la perception d’une tour d’ivoire, distante et inaccessible : il doit faire partie du milieu, en être une partie intégrante, réelle et palpable. Il doit aussi être rapproché des milieux administratifs, commerciaux et corporatifs, il est au cœur d’activités de tout acabit de la vie citoyenne.
N’étant pas expert en architecture, infrastructures publiques, urbanisme et aménagement du territoire, je peux cependant commenter avec assurance les aspects qui composent l’offre de soins et des services en santé et services sociaux, de même que sur les conséquences indirectes qui sont liées à la trajectoire des gens qui requièrent des soins à l’intérieur de notre région.
J’entends depuis mes premières implications dans le milieu en Outaouais il y a plus de 45 ans, toutes sortes d’observations citoyennes, d’usagers du système, des travailleurs de la santé, des milieux communautaires, des politiciens et des leaders régionaux sur comment devrait être organisé notre réseau, selon notre réalité propre.
Les tendances actuelles en termes de développement de complexes hospitaliers d’envergure sont claires, que ce soit au Québec, au Canada ou en Amérique du Nord : ils se retrouvent la majorité du temps dans les secteurs les plus urbanisés, au cœur des centres-villes. Les services connexes y sont majoritairement présents et variés. Le design est habituellement plus en hauteur et peu étalé. Les déplacements à l’intérieur des bâtiments sont facilités et efficaces, évitant les longs déplacements entre les différents secteurs de l’immeuble.
Les liens avec les secteurs communautaires sont cruciaux : ceux-ci sont établis dans les centres-villes. Ces secteurs ont besoin d‘avoir un accès simple et aisé aux services, et ne pas se sentir exclus comme cela pourrait l’être si l’établissement hospitalier est situé en périphérie, distant et éloigné. Peu importe la nature des services dispensés par l’hôpital, ces organismes doivent avoir l’impression que les services sont accessibles, près d’eux
Facteur non-négligeable: la proximité et la capacité des liens vers les hôpitaux d’Ottawa ne doivent pas être sous-estimées. La région de l’Outaouais comptera toujours sur certains services ultraspécialisés de ces hôpitaux : les réseaux de santé des deux se complémentent avec grande complicité et les échanges pour les services rares et très spécialisés sont courants. Il y a un lien naturel aisé entre les deux centres-villes.
Le centre-ville du secteur Hull est un secteur à privilégier puisqu’il répond aux différents éléments cruciaux et déterminants soulevés. On ne peut faire l’économie du choix d’un site dont la seule valeur au plan du réseau de la santé et services sociaux soit essentiellement basée sur une superficie prédéterminée de terrain, qui va à l’encontre des tendances observées dans les projets de cette envergure et au cœur des besoins essentiels des citoyens.