NOUVEL HÔPITAL :
POUR UNE PARTICIPATION POPULAIRE

Depuis plus de deux ans, les Québécois et Québécoises ont payé cher, très cher, pour constater l’état inquiétant de notre réseau de santé et l’importance, donc, de planifier judicieusement son développement. C’est souvent très précisément une question de vie ou de mort, comme nous le rappellent tristement les bilans de santé quotidiens des autorités de santé publique.

Ici à Gatineau, cette expérience coïncide avec la construction annoncée par le gouvernement du Québec, tout juste avant le déferlement de la pandémie, d’un nouvel hôpital affilié universitaire de 600 lits, qui répondra à la carence historique d’équipements de santé dans notre région.

En plus du progrès sanitaire évident, la réalisation de cette nouvelle infrastructure, en grande partie en fonction du choix de son emplacement, aura des répercussions économiques et sociales qui se feront sentir pendant des générations.

Le projet est déjà bien lancé. Ainsi, un peu plus de deux ans après l’annonce de la décision gouvernementale, la Ville de Gatineau a déjà répondu à la demande de la Société québécoise des infrastructures (SQI), de lui fournir une liste de terrains susceptibles d’accueillir un nouvel hôpital, bien que les critères exigés demeurent malheureusement obscurs. Il est prévu que le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais, responsable de la continuité, de l’accessibilité et de la qualité des services de santé sur notre territoire, la SQI et le ministère de la Santé et des services sociaux du gouvernement du Québec procéderont, à une date encore inconnue, mais prétendument assez rapprochée, au choix de l’emplacement le plus propice.

La responsabilité et la compétence de ces trois organismes dans la prestation des soins dont nous aurons besoin dans l’avenir ne font aucun doute. Mais, comme plusieurs individus et associations, il me semble qu’on fasse bien peu de cas, en haut lieu, de l’opinion des premiers intéressés par cette décision, c’est-à-dire la population locale. C’est pourquoi, après avoir suivi l’évolution de ce dossier autant que possible, j’exerce aujourd’hui mon privilège, comme un citoyen de Gatineau ayant participé à la vie politique aux niveaux municipal, provincial et fédéral, de faire publier cette lettre pour inviter le premier ministre François Legault, le ministre de la Santé et des Services sociaux Christian Dubé, le ministre de la Famille et ministre responsable de l’Outaouais Mathieu Lacombe et la mairesse de Gatineau France Bélisle à ouvrir la discussion sur l’emplacement de notre futur hôpital…sans ralentir sa construction. Je prends aussi la liberté d’exprimer ma préférence pour un site qui ferait partie du vieux centre-ville de Hull.

Malgré le peu d’encouragement officiel à le faire, d’autres citoyens et regroupements de citoyens ont voulu s’exprimer sur ce sujet. J’ai notamment été impressionné par la large mobilisation réalisée par la Coalition pour un centre hospitalier accessible et durable en Outaouais (CCHADO) derrière le choix d’un site du centre-ville. Vu l’importance de l’infrastructure publique planifiée et son impact régional et durable, le CCHADO souhaite que les autorités politiques québécoises et municipales favorisent une discussion aussi générale et transparente que possible entourant ce projet et se propose de faire la promotion des sites de quartiers-centres.

Je partage cependant l’analyse de tous ceux et celles qui croient que la facilité d’accès par voiture et l’accessibilité aux transports collectifs notamment pour les employés hospitaliers et toutes les clientèles doit être un facteur déterminant dans le choix du site. Comme ancien président de la Société de Transport de l’Outaouais qui a parrainé la création du corridor Rapibus, avec le maire Yves Ducharme, je n’ai aucune hésitation à affirmer que les emplacements disponibles dans les quartiers centraux du cœur du vieux Hull sont préférables à ceux proposés en périphérie. Il faut aussi noter que les employés et patients du futur hôpital vivant à l’extérieur de Gatineau disposeront d’un accès plus facile à cette institution par les grands réseaux routiers convergeant sur la ville si elle est située dans un quartier central de la ville. On pourra aussi démontrer qu’une construction plus centrale occasionnerait moins de gaz à effet de serre qu’un site situé à quelques kilomètres plus loin.

Bien que cela ne constitue pas l’objectif majeur de l’opération, je suis aussi sensible au fait que l’implantation d’un nouvel hôpital dans ce secteur favoriserait la revitalisation et la pérennité des quartiers du Hull historique, en conformité avec les objectifs du schéma d’aménagement de Gatineau, sur lequel j’ai travaillé naguère comme conseiller municipal. Comme les municipalités québécoises doivent produire des schémas d’aménagement à la demande du gouvernement du Québec, il me semble tomber sous les sens que celui-ci doit y accorder une attention étroite. Or, dans la dernière version du schéma de Gatineau, on peut lire que le développement de la ville devrait respecter les principes suivants : «Densifier le développement au sein des pôles structurants sur le territoire, et en bordure des corridors de transport en commun rapide ou des axes à haut niveau de service; consolider le développement à l’intérieur de la trame existante; favoriser la croissance près des principaux pôles structurants : le centre-ville, les pôles mixtes…»

Nous sommes, bien sûr, très reconnaissants au gouvernement du premier ministre Legault d’avoir investi dans le système de santé de la région.

Comme fiers citoyens et citoyennes d’une agglomération qui est devenue la quatrième en importance au Québec en protégeant son unité, il y a un peu plus d’une quinzaine d’années, nous réclamons aujourd’hui le droit de participer, avec les autorités gouvernementales, à une autre étape importante de notre développement.
Lawrence Cannon, ancien ambassadeur du Canada en France, ex-ministre Fédéral des Transports et des Affaires Étrangères, ex-député du Pontiac, ex-président de la STO et ex-conseiller municipal de la Ville de Gatineau